Silvana Solivella (Lausanne)

Silvana Solivella (Lausanne)

Grammaire blanche suivi de Belles saisons imparfaites

A l’origine, la lecture du livre précédent de l’auteure, Rien qui se dise, m’a touchée au point de vouloir me lancer dans cette aventure créative les yeux fermés. J’ai donc dévoré les deux inédits proposés et décidé de réaliser un livre composé de ces deux textes dans une logique de continuité, jouant les évocations et alliant la structure visuelle à l’inventaire des mots.

Qu’ils soient l’enceinte d’un paysage intérieur dévasté ou les murs d’une maison délabrée, ces textes puisent dans les profondeurs de l’âme et la face cachée des choses, ils éclairent le regard que l’artiste porte sur le monde.

Partant de la conviction que l’écriture et la peinture partagent d’identiques pièges et chimères, j’ai conçu la maquette du livre dans une tentative de dialogue dont la fluidité m’a paru naturelle. Les phrases ont éclairé mon cheminement dans un ordre où la trame des textes et les illustrations se répondaient. Parfois même ils semblaient se chevaucher et s’entrelacer.

A ces petits extraits d’une vie, images d’altérité et de débordements de soi, j’ai associé mon propre univers créatif à la quête subtile de l’auteure afin de puiser dans sa force et la fragilité des mots. Ma proposition plastique se plonge dans les racines, évoque la mémoire, l’effacement des images et les pertes irrémédiables. A partir d’objets personnels, le travail s’est construit avec des fragments de mes tableaux, matériel photographique et dessins. La couleur blanche empreinte d’une touche ensoleillée est prédominante.

La conception du livre fait appel à diverses techniques : monotypes, collages, poinçonnages ou dessins sur des supports différents avec des textures et qualités diverses. Certains papiers sont manufacturés. Pour des interventions directes, j’ai utilisé des feuilles plus épaisses parfois accompagnées de calques créant des enluminures pour les textes en filigrane. J’ai également employé des reproductions qui incluent des fragments de mes propres œuvres, ou d’objets familiers. Ils s’insèrent dans le texte et cultivent le mystère de sa structure en creux.

L’ensemble se compose de 96 pages reliées, dont la couverture est en carton entoilé rayé rappelant les murs d’une chambre d’enfant. Un crayon, un pinceau, une épingle à cheveux et deux vieilles clés en guise de pistes de lecture soulignent les titres. Le livre s’insère dans un coffret en bois fermé, au pouvoir poétique et évocateur des trésors rangés dans une boîte à secrets, mais dont l’urne en matériel translucide (verre acrylique) permet de deviner le contenu : un cartable de présentation entoilé et le titre en lettres brodées. L’ouvrage est accompagné de trois objets symboliques : une fleur, une hirondelle et un coquillage. Ils suggèrent les déambulations dans les territoires limites de l’enfance, là où l’intelligence et l’intuition cohabitent toujours mais dont l’insouciance semble avoir été abruptement interrompue.

 
 
 
 
 

Silvana Solivella