Disputations chrestiennes

Disputations chrestiennes, en manière de deviz, divisées par dialogues
Genève, Jean Girard, 1544, 3 parties

BCU Lausanne (TG 172) et BGE Genève (Bc 850* exemplaire numérisé)

Avec les Disputations chrestiennes, Viret inaugure le genre où il va exceller : celui du dialogue. Il met en scène quatre personnages débattant de questions religieuses et de problèmes de société. Deux d’entre eux sont protestants (Théophile, spécialiste de la littérature sacrée ; Hilaire, humaniste, fin connaisseur de la littérature de l’Antiquité gréco-romaine). Le troisième, Eusèbe, incarne un catholique, tandis que le dernier, Thomas, un laïc doué d’un bon sens à toute épreuve, cherche à déterminer dans quel camp se trouve « la Vérité ». Ce personnage, qui, grâce à ses questions, donne leur rythme aux dialogues, représente les lecteurs hésitants mais plein de bon sens que Viret cherche à convertir au protestantisme. C’est Jean Calvin qui signe la préface ouvrant les Disputations chrétiennes, dans laquelle il prend la défense de l’humour, parfois mordant, déployé par Viret dans un ouvrage traitant, au fond, de matières sérieuses.
Les Disputations chrétiennes ont été censurées par la Sorbonne en 1547 et mis à l’index à Rome en 1559, de concert avec l’ensemble des œuvres de Pierre Viret.

Extrait

Bref, ils trouveront partout à dire, comme nous le voyons par expérience de notre temps. Plusieurs au commencement se sont mis à toucher quelque peu aucuns abus, encore des plus gros et des plus apparents. Ces hypocrites ne les ont pu porter, mais les ont persécutés par mer et par terre. Ils n’ont pas seulement pu endurer qu’on ait touché d’un petit doigt leur idolâtrie et superstition, et qu’on ait ouvert la bouche pour parler un mot pour réformer leur état, mais qui plus est, se sont déclarés ennemis de toutes gens savants, qui ont travaillé à abolir barbarie et sophisterie, pour remettre les bonnes lettres et autres disciplines au-dessus : et les ont tenus et condamnés pour hérétiques, et mis en gros danger de leur vie. Puis donc qu’ils n’ont pu endurer ceux-ci, qui y allaient tant doucement, non pas seulement des petits dialogues, et colloques familiers pour les petits enfants, qui leur faisaient encore trop plus d’honneur qu’ils ne méritaient, et les flattaient plus qu’il n’était de besoin, Dieu en a suscité d’autres, qui ont tellement remué leur ordure, laquelle les autres n’avaient fait qu’un petit chatouiller par-dessus, qu’ils en ont fait tellement sortir la puantise, que tout le monde s’en est aperçu, et la sentie, en sorte qu’on ne la peut plus porter. Quand ces âpres chirurgiens se sont venus, qui ont fourré leur fer si avant dedans l’apostume qu’ils les ont percés jusques au cœur et aux os, ils ont commencé de regretter les premiers, qui ne faisaient qu’un petit toucher les plaies par-dehors, et par leur douceur les faisaient rogneuses, ne faisant que quelque cure palliative. Quand ils ont eu expérimenté les seconds, ils ont crié à l’arme contre, et ont été contraints de louer, au prix de ceux-ci, les premiers qu’ils condamnaient. (p. 75-77)

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